Ce soir, un grand
ciel clair, surnaturel, abstrait,
Froid d’étoiles, infiniment inaccessible
À la prière humaine, un grand ciel clair paraît.
Il fige en son miroir l’éternité visible.
Le gel étreint cet infini d’argent et d’or,
Le gel étreint, les vents, la grève et le silence
Et les plaines et les plaines ; le gel qui mord
Les lointains bleus, où les astres pointent leur lance.
Silencieux, les bois, la mer et ce grand ciel
Et sa lueur immobile et dardante !
Et rien qui remuera cet ordre essentiel
Et ce règne de neige acerbe et corrodante.
Immutabilité totale. On sent du fer
Et des étaux serrer son cœur morne et candide ;
Et la crainte saisit d’un immortel hiver
Et d’un grand Dieu soudain, glacial et splendide.
Émile Verhaeren
|